De nombreuses entreprises se tournent vers l’industrie spatiale. (Ph: Dr).
Abidjan accueille, jusqu’à ce vendredi 28 avril 2023, la seconde édition du forum africain sur l’espace, organisé par l’Union africaine. Ce forum réuni près de 300 décideurs, ingénieurs ainsi que des entreprises du domaine spatial du continent. Leur but : développer la coopération sud-sud en matière de recherche, de formation et de partages d’informations. Le tout avec une arrière-pensée pratique : l’accès à cette industrie permet de développer l’économie locale, de lutter contre le changement climatique et d’améliorer les techniques agricoles.
D’après l’Union africaine, le continent compte une cinquantaine de satellites. En 2021, ce domaine générait près de 10 mille milliards de francs Cfa (20 milliards de dollars) et de nombreuses entreprises se tournent vers l’industrie spatiale, d’après nos confrères du site de Rfi en Côte d’Ivoire. Un développement rapide, qui cache cependant un fossé encore important à combler : celui de la formation. « Vous pouvez recueillir le degré d’humidité dans un champ de betteraves, et si vous n’arrivez pas à interpréter cette donnée pour dire "là, il y a sècheresse, il faut faire quelque chose", ça ne sert à rien », explique Mohamed Belhocine, le commissaire de l’Ua pour l’éducation, la science, la technologie et l’Innovation. « Nous sommes en train de mettre en place les outils qui permettent au continent d’avoir un minimum d’autonomie et un minimum de cohérence dans les politiques africaines, ajoute ce responsable de l’Ua. [...] Nous avons l’agence africaine de l’espace établie au Caire. Nous souhaitons qu'elle devienne le creuset autour duquel vont s’agréger l’intégralité des agences nationales spatiales ». Miser sur la formation permettrait de sortir d’un schéma, dans lequel tout est importé de l’étranger.
Un développement rapide, qui cache cependant un fossé encore important à combler : celui de la formation.
« L’idée novatrice, c’est que du début jusqu’à la fin de la chaîne, on connaisse toutes les compétences, toutes les ressources intellectuelles parce que nous formons les jeunes, explique Eric N’Guessan, le secrétaire général de l’Association africaine pour la technologie et l’Innovation. Nous formons aux maths, nous formons à l’électronique, nous formons à la programmation pour que l'on puisse maîtriser toute la chaîne pour arriver au satellite. Aujourd’hui, on est capable de maîtriser cette chaîne, poursuit ce scientifique. Le dernier maillon, c’est le lanceur. Et donc maîtrisons toutes les technologies nécessaires pour aller jusqu’au lanceur ».
Le spatial pour acquérir des données sur le couvert forestier
En février 2010, le Gabon s’est lancé dans l’industrie spatiale. Avec une idée en tête : mieux maîtriser les changements climatiques et obtenir des données fiables du couvert forestier pour calculer l’émission de gaz à effet de serre. En montant son agence spatiale, et en acquérant un satellite, le Gabon a pu élargir les champs d’application de cet outil. « Avant, on dépensait beaucoup de millions de francs Cfa, [on affectait] beaucoup de personnel pour engager des missions sur le terrain qui duraient six mois, sept mois, pour aller faire l’inventaire forestier », se souvient Aboubakar Mambimba Ndjoungui, le directeur adjoint de l’Agence gabonaise d’études et d’observations spatiales (Ageos). « Avec le satellite que nous avons, aujourd’hui, on a peu de monde sur le terrain, on va seulement dans des endroits où il manque des données, ajoute-t-il. On a gagné en temps et en finance. On a un apport très important sur les questions liées aux inondations : les outils satellites nous permettent, en effet, d’identifier les zones inondables, et éviter les catastrophes naturelles. » Ce service a désormais une visée sous- régionale : le Gabon peut couvrir 24 pays et répond aux besoins des États qui n’ont pas encore de satellites. « Nous suivons l’évolution du lac Tchad, explique Aboubakar Mambimba Ndjoungui. Nous suivons aussi le golfe de Guinée, puisqu’il y a la pêche illégale, il y a la piraterie, il y a la pollution en hydrocarbures. Tous ces aspects-là sont gérés au niveau technique par Ageos qui fournit des informations précises à l’ensemble des acteurs qui doivent intervenir ». À travers cette conférence, l’UA encourage vivement chaque État à développer, à son échelle, cette industrie et à créer des synergies.
André Lepro