Le président de la transition au Gabon, le général Brice Oligui Nguema, a nommé jeudi 7 septembre Premier ministre de transition Raymond Ndong Sima, un économiste et virulent opposant au président Ali Bongo renversé par les militaires il y a une semaine, selon un décret lu à la télévision d'État.
Raymond Ndong Sima, 68 ans, avait été Premier ministre d'Ali Bongo de 2012 à 2014 mais s'était éloigné du pouvoir, qu'il accusait régulièrement de mauvaise gouvernance jusqu'à se présenter contre le chef de l'État aux présidentielles de 2016 et 2023. Pour cette dernière, il s'était désisté au dernier moment au profit d'un candidat commun aux principaux mouvements et partis de l'opposition.
Gouvernement de transition attendu
Le général Oligui Nguema, qui a mené le coup d'État du 30 août contre un Ali Bongo à peine proclamé réélu dans une élection "frauduleuse", selon les militaires, a prêté serment lundi en tant que président d'une période de transition dont il n'a pas fixé la durée, et au terme de laquelle il a promis des "élections libres".
Lundi, il avait aussi annoncé la formation d'un gouvernement de transition comprenant des personnalités de tous bords politiques.
Puis une nouvelle Constitution élaborée avec les représentants de "toutes les forces vives de la Nation", qui sera soumise à référendum, et "plus respectueuse de la démocratie et des droits humains".
Quelques minutes après l'annonce de sa nomination, Raymond Ndong Sima a dit à l'Afp espérer soumettre au général Oligui Nguema "d'ici trois à quatre jours une proposition" de gouvernement de transition.
Toutes les familles politiques...
"On m'a remis une feuille de route, et je vais essayer de travailler dans le sens de ce que les militaires ont décidé" pour "qu'on remette en ordre l'ensemble des institutions et notamment tout ce qui concerne le cadre des élections", a-t-il expliqué par téléphone. "Je veux consulter largement" et "sans précipitation" pour "faire en sorte que les gens appartenant à toutes les familles politiques se retrouvent" dans le gouvernement, a-t-il conclu.
Natif de la province du Woleu-Ntem, berceau de l'ethnie fang majoritaire au Gabon et l'un des fiefs historiques de l'opposition à la famille Bongo, Raymond Ndong Sima est notamment diplômé d'économétrie de l'université Paris-Dauphine de Paris.
Mercredi, il avait annoncé se retirer de la principale plateforme de l'ancienne opposition, Alternance 2023, dont il était l'un des ténors avec cinq autres candidats déclarés à la présidentielle, pointant une "situation confuse depuis plusieurs jours". Cinq des six leaders d'Alternance 2023, dont lui-même, avaient ostensiblement rallié le nouveau pouvoir militaire quand la position du dernier, le candidat commun d'Alternance 2023 à la présidentielle, Albert Ondo Ossa, n'était pas clairement exprimée.
Il y a trois jours, Raymond Ndong Sima avait déjà affirmé à l'Afp la nécessité de "discuter avec les militaires", recommandant toutefois que la transition n'excède pas "24 mois". Il se disait alors "intéressé par la prochaine présidentielle", à laquelle "les militaires ne doivent pas participer".
Mardi, le général Oligui Nguema a annoncé qu'Ali Bongo, jusqu'alors en résidence surveillée à Libreville, "était libre de ses mouvements" et, "compte tenu de son état de santé", de "se rendre à l'étranger" pour des contrôles médicaux. Le chef de l'État déchu a subi un grave Avc en 2018 dont il garde des séquelles physiques.
Le coup d'État a été mené sans effusion de sang, par des militaires unis derrière le général Oligui Nguema et les chefs de tous les corps de l'armée et de la police.
Les putschistes avaient rapidement suscité le ralliement de la quasi-totalité des partis de l'ancienne opposition.
Tout comme une partie de l'ex-majorité, ainsi qu'un élan massif d'une population les remerciant de l'avoir "libérée" de 55 ans de "dynastie Bongo" au pouvoir.