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Football : Un ex-professionnel ivoirien révèle, « Après m’avoir soutiré 131 millions Cfa, un marabout me demande de sacrifier mon fils »

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Des footballeurs ont souvent recours au maraboutage ou fétichisme dans leur carrière. (Ph: dr)
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« C'est un engrenage où on peut être esclave et ça peut être très destructeur… ». Un ex-footballeur professionnel raconte au confrère de l'Afp l'emprise d'un marabout parisien consulté pour améliorer ses performances. L'homme l'escroquera de 131 millions de francs Cfa (200.000 euros).

Pour sensibiliser les jeunes sportifs, Gilles Yapi Yapo, âgé aujourd’hui de 41 ans, ex-footballeur professionnel ivoirien, formé à l’académie de Jean-Marc Guillou à l’Asec mimosas, devenu entraîneur de foot en Suisse, a accepté de raconter ses deux années de relation de « prestation de services », avec un marabout à Paris. 

Tout commence quand le footballeur a 23 ans et joue au Fc Nantes (ouest de la France).

Alors qu'il « traverse une période difficile au niveau sportif », il décide de consulter ce marabout à Paris, recommandé par son oncle. « Le marabout consultait la nuit dans son appartement, je faisais souvent le trajet Nantes-Paris...Je ne suis pas attiré par l'occultisme », souhaite souligner M. Yapi Yapo, « mais j'ai grandi en Côte d'Ivoire avec l'idée qu'aller voir un marabout est courant et pas quelque chose de mauvais du moment qu'on ne cherche pas à faire du mal à autrui ».

Le "diagnostic" du marabout pointe une "malédiction" dans sa famille qui l'empêcherait "de réussir et d'être heureux". Solution préconisée: "faire des sacrifices pour contrecarrer ces malédictions". Ces sacrifices, poule, coq, chèvre ou bélier…débutent au tarif de 327 mille francs Cfa (500 euros), jusqu'à atteindre "des sommes colossales". Et puis un jour, « il y a eu comme de la magie noire », poursuit-il. Et d’ajouter : « Le marabout m'a fait croire que les esprits pour lesquels il travaillait m'aimaient bien et qu'ils voulaient me rendre riche... Cela a été comme un appât ».

131 millions de francs Cfa exigés

Les consultations "changent de voie", à la recherche de cette richesse promise, avec ‘’des sacrifices à 26 millions, 32 millions, 39 millions de francs Cfa (respectivement 40.000, 50.000, puis 60.000 euros) ‘’. Le footballeur "s'essouffle financièrement". Le marabout dit alors « que s’il n'y avait plus d'argent, qu'il fallait sacrifier son fils ».

 « J'ai eu une force en moi qui m'a dit stop et je ne suis plus allé le voir », relate-t-il. « En deux ans, ces dépenses que je considère aujourd'hui comme une escroquerie se sont montées à 131 millions de francs Cfa (200.000 euros) », lance M. Yapi Yapo, qui confie n'"avoir eu aucun résultat positif".

Pourquoi avoir poursuivi cette relation tout ce temps ?

« Il a su me mettre dans un engrenage où j'avais perdu toute lucidité... ». Il explique « avoir eu la chance alors de rencontrer Jésus » et « la force » de quitter cette relation toxique. Certains marabouts "menacent de représailles", témoigne-t-il, et "donc, il y a une peur de s'en détacher".

L'aumônier des sportifs de haut niveau en France, Joël Thibault, témoigne avoir dû gérer dans ses accompagnements les "dangers" de telles emprises et "les conséquences désastreuses" sur des footballeurs et des basketteurs. « Je sais qu'il y a des clubs, des dirigeants qui donnent des autorisations à des joueurs de partir au Sénégal parce qu'ils sont blessés et que les médecins n'arrivent pas à les soigner; ils vont là-bas et reviennent jouer avec des ceintures de protection et des amulettes ».

Des joueurs consultant des marabouts en France lui ont raconté que "dès qu'ils allaient moins bien, il fallait augmenter les sacrifices, payer plus cher ; ça devient un engrenage". "Je vois les dégâts... des joueurs qui ont fait une dépression, eu des pensées suicidaires."

Etre "Dépendants"

Cissé Baratté, 55 ans, ancien footballeur professionnel ivoirien, a décrit à l'Afp le même processus d'emprise vécu alors qu'il jouait en France.

C'est dès l'âge de 16 ans, appelé à jouer dans une équipe à haut niveau à Abidjan, qu'il est approché par une personne du milieu de son club pour "l'inciter à se protéger des jalousies" et lui proposer d'"être plus performant".

« Je suis tombé dans le panneau », lance-t-il. Il débute alors "les douches avec des potions" prescrites par un marabout, le port d'une "ceinture de sécurité" - des versets du Coran cousus dans une peau de vache, décrit-il -, et les sacrifices. 

« Dès que j'avais des blessures et que quelque chose n'allait pas, mes pensées étaient d'aller le voir; il devient un peu comme un Dieu... on devient dépendant et il en profite... », poursuit-il.

Après son arrivée en Europe dans les années 90 - notamment au Angers Sporting Club de l'Ouest (SCO) - il poursuivra ces pratiques. « J'avais toujours des blessures », relate-t-il. « Le marabout disait que c'était parce que je ne respectais pas les moments où prendre des douches avec la potion ou parce qu'il faisait froid... ».

 Dans son équipe à Angers à l'époque, il dit avoir côtoyé des joueurs d'origines sénégalaise et camerounaise et avoir noté dans les vestiaires leurs "protections" : des "parfums" ou des "ceintures de sécurité" sous le maillot.

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 A chacun de s’en faire une idée. M. Yapi Yapo est convaincu que le recours au maraboutisme dans le milieu du football en France, "malheureusement ça ne va pas s'arrêter".

 

 

 

 

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