Sur les 28 personnes greffées d'une partie ou de la totalité du visage, vingt-cinq sont encore en vie. Il y a neuf ans, Isabelle Dinoire, une femme de 38ans défigurée après avoir été mordu par son labrador, entrait dans l'histoire de la médecine en devenant la première receveuse au monde d'une greffe de visage, au CHU d'Amiens.
Une chirurgie qui suscite de l'intérêt
Depuis, près d'une trentaine d'adultes ont subi ce type d'opération dont un tiers en France. le recul grandissant sur cette chirurgie spectaculaire, considérée il n'y a pas si longtemps comme relevant de la science-fiction, a conduit l'un des rares chirurgiens à l'avoir tentée, l'espagnol Edouard Rodriguez, à dresser un bilan de cette transplantation encore expérimentale, qui a brisé l'un des ultimes tabous de la médecine moderne.
Le pari était risqué
Comme le rappelle le PR Rodriguez en ouverture de son article paru fin avril dans le "lancet", la greffe de visage met en péril la survie du patient, alors même qu'elle ne répond pas à un besoin vital. Mais en cas de succès, elle promet d'améliorer la vie d'individus atrocement défigurés. À la première mondiale réalisée par l'équipe du PR Bernard Devauchelle, le 27 novembre 2005, ont succédé au moins vingt sept opérations recensées par l'auteur, en France, aux Etats Unis , en Espagne, en Belgique, en Pologne, en chine, et en Turquie. Sur les 28 personnes greffées d'une partie ou de la totalité du visage, 25 sont encore en vie.
Malgré ces trois pertes dramatique, la grande majorité des greffes se sont déroulés «de manière relativement sereine, surtout lorsqu'on les comparé aux accidents majeurs survenues aux premiers greffés du cœur ou du foie», commente le PR Benoît Lengélé (ucl Bruxelles), qui a opéré à trois reprises avec le PR Devauchelle. À l'issue d'une greffe combinant, selon les cas, peau tissus internes, os, dents, cartilage, langue, glandes lacrymales, les patients recouvrement non seulement un visage humain mais, surtout ,la capacité de parler, de déglutir, de manager, de respirer par la bouche ou le nez.
C'est quoi une greffe de visage ?
"Le terme" greffe de visage " est aujourd'hui passé dans le langage courant, reconnaît le professeur Bernard Devauchelle. Chef du service de chirurgie maxillo-faciale au CHU d'Amiens- sud Picardie. Mais en 2005, lorsque j'ai réalisé la première opération de ce type au monde, le comité consultatif national d'éthique nous obligerait à utiliser le terme d'allotransplantation de tissu composite au niveau de la face.
Aujourd'hui, on utilise le terme de "greffe de visage" pour désigner une opération qui consiste à reconstruire toute les parties d'un visage, à l'aide d'un don d'organe effectué par un donneur vers un receveur récemment décédé sont prélevées tout comme les os. Les muscles de la face, puis sont greffés sur le receveur. Vaisseaux sanguins et terminaison nerveuse doivent ensuite être reconnectés. Il s'agit d'une opération extrêmement complexe qui n'est pas entraîné seulement de risques de rejet mais également par des conséquences psychologiques. La greffe totale du visage pose également un souci éthique.