Juché sur un bus devant son domicile d'Istanbul, comme le rapporte France 24, le président de 69 ans, dont 20 pouvoir, avait revendiqué la victoire en début de soirée devant une mer de drapeaux rouges brandis par une foule enthousiaste. De retour à Ankara, il a été accueilli par des dizaines de milliers de partisans qui l'attendaient depuis des heures devant le palais présidentiel.
Un appel à la solidarité et à l'unité tout en jouant sur le nationalisme
Recep Tayyip Erdogan, confirmé dimanche pour cinq années supplémentaires à la tête de la Turquie, a appelé son pays à "la solidarité et à l'unité" face aux défis qui l'attendent. Ni le désir de changement d’une partie de l’électorat, ni l’inflation sévère qui mine la Turquie, ni les restrictions aux libertés et l’hyperprésidentialisation d’un pouvoir qui a envoyé des dizaines de milliers d’opposants derrière les barreaux ou en exil, n’ont pesé face au désir de sécurité et de stabilité comme le rapporte le confrère La Presse.
Pas même les conséquences du terrible séisme de février (au moins 50 000 morts et 3 millions de déplacés) dans 11 provinces du sud du pays, qui ont largement reconduit le chef de l’État. Erdogan a joué la carte du nationalisme avec beaucoup d’habileté, l’opposition n’a pas su proposer une alternative susceptible » de convaincre malgré la mauvaise situation économique du pays, a estimé Galip Dalay, chercheur associé Middle East Council on Global Affairs.
Le parti du président Erdogan, l’AKP islamoconservateur, sur lequel il a bâti son accession au pouvoir suprême, a perdu des sièges au Parlement, mais conserve sa majorité avec ses alliés. Kemal Kiliçdaroglu encaisse quant à lui une défaite de plus après avoir promis le « retour du printemps ». Considéré par beaucoup, y compris au sein de son alliance d’opposition, comme terne et sans charisme, M. Kiliçadaroglu n’a pas su profiter de la crise économique pour rafler la victoire.
Le camp Erdogan n’a eu de cesse de qualifier l’opposition emmenée par Kiliçdaroglu de « terroriste » en raison du soutien que lui ont apporté les responsables du parti prokurde HDP. Les personnes interrogées par l’AFP dans les files d’attente des bureaux de vote ont témoigné de la polarisation du pays après ces semaines de campagne. Kemal Kiliçdaroglu a été largement privé d’accès aux grands médias et surtout aux chaînes de télévision officielles, qui ont réservé soixante fois plus de temps d’antenne à son rival, selon l’organisation Reporters sans frontières.
Le camp Erdogan n’a eu de cesse de qualifier l’opposition emmenée par Kiliçdaroglu de terroriste
Face à son rival discret d’obédience alévie, une branche de l’islam jugée hérétique par les sunnites rigoristes, Recep Tayyip Erdogan a multiplié les rassemblements, s’appuyant sur les transformations qu’il a su apporter au pays depuis son accession au pouvoir comme premier ministre en 2003.
Sa réélection intervient 10 ans jour pour jour après le début des grandes manifestations de « Gezi » qui s’étaient répandues dans tout le pays et avaient été sévèrement réprimées.