André HABA
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C’est sa première intervention depuis son incarcération, mais elle avait été préenregistrée il y a des mois. Dans une vidéo diffusée jeudi soir à 21 heures locales, Ousmane Sonko est revenu longuement sur ses démêlés avec la justice sénégalaise, et sur le complot qu’il accuse Macky Sall d’avoir monté contre lui pour l’empêcher de participer à la présidentielle.
C’est parce qu’il sait qu’il va être incarcéré qu’il a pris la décision d’enregistrer une série de vidéos depuis son domicile, explique-t-il face caméra. « [Le pouvoir] envisage de m’accuser de divers méfaits, de me maintenir en prison avant et pendant les élections, sans envisager ma libération avant la présidentielle », accuse l’opposant.
Stratégie en place
Il détaille alors la stratégie qu’il a élaborée avant son arrestation pour « vol de téléphone » le 28 juillet 2023 – il sera par la suite écroué pour « complot contre l’État ». « Notre projet, nous ne voulons pas le mettre en place en 2029 ou en 2034, mais en 2024 », insiste-t-il. Il explique pourquoi il a proposé à plusieurs de ses proches, au sein de son parti ou parmi ses alliés, de présenter leur candidature au cas où la sienne serait invalidée.
« Auparavant, nous avions toujours refusé de parler de plan B, pour ne pas donner l’impression que nous avions perdu espoir. Mais comme le dit l’expression, on ne met pas tous ses œufs dans le même panier. C’est cette stratégie que nous avons voulu reproduire en récupérant plusieurs fiches de parrainages. »
Peu de temps après son incarcération, Ousmane Sonko avait donc contacté plusieurs de ses proches pour leur demander de se lancer eux aussi dans la course, afin d’éviter de se retrouver sans candidat lors du scrutin.
Trois alternatives existent aujourd’hui pour remplacer le fondateur du parti des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), désormais dissous : son secrétaire général Bassirou Diomaye Faye, l’ancien ministre libéral Habib Sy, et l’économiste Cheikh Tidiane Dieye.
Choix naturel
Les tractations se sont intensifiées ces derniers jours entre l’opposant et ses alliés, afin qu’il confirme officiellement le nom de son candidat. Empêché de recevoir de la visite en prison, hormis celle de sa famille, de ses avocats et de son médecin, Ousmane Sonko a pu s’entretenir indirectement avec les trois candidats alternatifs.
« Il a promis de décider sans [donner] de délai », glisse-t-on dans son entourage. Des discussions se tiennent également au sein du mouvement Lacos (Leaders alliés du candidat Ousmane Sonko), qui tente de proposer une position commune et qui mène les discussions avec les candidats recalés pour opérer des ralliements , à l’instar de l’ancien ministre Mary Teuw Niane, qui a annoncé jeudi soutenir le candidat de Sonko.
« Il n’y a pas de surprise à avoir : le choix naturel, c’est celui de Bassirou Diomaye Faye », coupe court un intime du maire de Ziguinchor dans des propos au confrère de ‘’Jeune Afrique’’.
Mais d’autres membres de son entourage disent attendre la validation du leader. « Quel que soit notre candidat, notre but est de gagner au premier tour avec 75 % des voix.
Le projet Pastef n’est pas un projet individuel », a insisté Ousmane Sonko dans la vidéo diffusée ce jeudi. Lorsque le « plan B » sera confirmé, les candidats restants pourraient néanmoins rester dans la course en appelant à voter pour ce candidat, une manière de multiplier le temps d’antenne et d’occuper l’espace.
Une façon aussi pour Bassirou Diomaye Faye, s’il venait à être confirmé, de pouvoir mener campagne par procuration : le bras droit d’Ousmane Sonko est placé en détention provisoire depuis dix mois.
